Le salon des Solutions
environnementales du Grand Ouest

Les Actualités

Préserver cultures et insectes, sans pesticides : en Bretagne, ces scientifiques l’ont fait

27/09/2023

Préserver cultures et insectes, sans pesticides : en Bretagne, ces scientifiques l’ont fait

Joan Van Baaren, directrice du laboratoire Ecobio de l’université de Rennes, avec son assistante Stéphanie Llopis, technicienne, Julie Besnard et Mattéo Péan, stagiaires en Licence 3, Ils effectuent des prélèvements d’insectes dans une parcelle d’orge près de Rennes (Ille-et-Vilaine). | VINCENT MICHEL / OUEST-FRANCE

Depuis quinze ans, les scientifiques rennais du laboratoire Ecobio expérimentent la régulation des insectes ravageurs de cultures par d’autres insectes, sans user de pesticides et en replantant des bandes fleuries. Une biorégulation bénéfique pour les insectes, dont les populations s’effondrent, et la biodiversité.

Il ne s’agit pas d’un mouvement sectaire mais bien de quatre scientifiques rennais du labo Ecobio, qui parcourent en zigzag ce champ verdoyant de la métropole rennaise, tête baissée dans les tiges d’orge. L’objet de leur attention : la recherche de pucerons (ravageurs de cultures) et de « momies » de parasitoïdes, ces insectes qui tuent les pucerons en pondant leurs œufs dedans.

Réguler les insectes par les insectes

D’où le terme de momie : « une peau séchée de puceron, dans laquelle on trouve une larve de parasitoïde », détaille Joan Van Baaren, directrice du laboratoire Ecobio de l’université de Rennes, qui étudie l’influence des changements climatiques et la gestion de l’environnement sur les insectes. Dont les populations s’effondrent partout dans le monde, du fait de la disparition de leurs habitats, du changement climatique mais aussi des pesticides.

C’est pour en diminuer drastiquement l’usage, voire les supprimer, que l’équipe d’Ecobio travaille depuis plus de 15 ans sur le « contrôle biologique », le fait de réguler le nombre d’insectes ravageurs de cultures en favorisant la présence d’autres insectes qui les tuent (parasitoïdes, carabes, araignées, syrphes…). Les pucerons, en prélevant de la sève aux plants d’orge ou de blé, et en leur transmettant le virus de la jaunisse, font en effet chuter les rendements.

Mais pour favoriser la présence de ces insectes régulateurs, il faut de la biodiversité. Ce que les arrachages de haies et épandages de pesticides des cinquante dernières années n’ont pas favorisé. Or, rien qu’une bande fleurie de moutarde, sarrasin, féverole etc. de trois mètres sur 150, le long, « peut avoir des effets sur un champ, même conventionnel, immense : c’est une zone de refuge et d’alimentation. Bien nourri, un parasitoïde adulte peur vivre 15 jours et tuer plusieurs centaines de pucerons. Sans quoi, il survit deux jours et n’en tue qu’une vingtaine. »

Si en Bretagne, les scientifiques constatent un effondrement du nombre de pucerons ces dernières années, ce n’est pas – encore – le cas dans d’autres pays européens plus à l’est. Ces travaux « ont scientifiquement prouvé que cela a un effet positif sur la biodiversité, la baisse du nombre de pucerons et le taux de jaunisse. Mais aussi que c’est transposable à grande échelle, et que ce qui a fonctionné sur les cultures de céréales peut s’appliquer à d’autres, comme les betteraves. »

Une solution pour les cultures betteravières ?

Cette autre culture est très exposée à une autre forme de jaunisse, elle aussi transmise par les pucerons et pour laquelle il y a encore des dérogations pour utiliser des insecticides « tueurs d’abeilles » néonicotinoïdes. Pour passer des champs expérimentaux à une mise en application nationale, voire européenne, Joan Van Baaren commence à coopérer avec une économiste de l’université de Rennes. Car pour convaincre agriculteurs comme décideurs, il faut « travailler sur le modèle économique du système ».

ouest-france


Annonce Publicitaire Annonce Publicitaire