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Renault se lance dans les navettes autonomes
20/05/2024
La navette autonome prototype de Renault lors du test pour les journalistes sur le site de l'entreprise française à Guyancourt. (Crédits : Olivier Martingambier)
Le constructeur français a annoncé l'arrivée de navettes autonomes sur la base de son modèle Master électrique d'ici la fin de la décennie. L'objectif est de rendre le transport de passagers plus flexible et moins coûteux. Deux prototypes seront testés à Roland-Garros cette semaine.
Il n'y aura pas de voitures particulières sans chauffeurs, mais il y aura des navettes. C'est en tout cas ce que propose Renault d'ici la fin de la décennie. Concrètement, ces navettes électriques transporteront une vingtaine de personnes dans les métropoles qui doivent réduire leur pollution, comme Paris ou Lyon en France, à des vitesses entre 30 km/h et 70 km/h.
En tout, 400 villes pourraient être intéressées, relève le constructeur français. Deux prototypes de ces futurs véhicules sans chauffeurs circuleront pour Roland Garros pour les VIP. Une opération pilote devrait avoir lieu à Châteauroux en 2026 et une commercialisation autour de 2027-2028.
Lors d'un test aux journalistes sur 3 kilomètres, Renault a tenu à rassurer quant à la sécurité de ces navettes, bardées de capteurs. Ce système est considéré comme une autonomie de niveau 4 sur 5, à savoir une autonomie totale mais dans un environnement identique - ici, en ville. Le niveau 5 serait un véhicule capable à la fois d'aller sur l'autoroute et en ville ainsi que de se déplacer entre les villes. « Il y a encore quelques expérimentations pour ce niveau mais on s'éloigne au fur et à mesure », a souligné Gilles Le Borgne, directeur technique de du groupe Renault.
Aucune fausse note lors du test
Le parcours en navette autonome est très souple et aucune fausse note n'a été détectée. Le véhicule s'est arrêté à chaque traversée de piétons et a bien ralenti avant chaque croisement, laissant la priorité lorsque cela était nécessaire. Mais le trajet restait très simple et la réalité du trafic urbain doit encore être testée. Tous les systèmes sont doublés en cas de panne sur l'un d'eux, comme dans un avion. Un bouton d'arrêt d'urgence est positionné dans le véhicule, mais Renault ne sait pas encore s'il sera gardé ou pas dans ses navettes commercialisées.
Ces prototypes testés par les journalistes sont en réalité des véhicules de l'entreprise chinoise WeRide dans laquelle Renault a investi en 2018. WeRide est la seule entreprise dont les navettes autonomes sont homologuées et circulent librement en Chine, à Singapour, aux Emirats arabe unis ainsi qu'aux Etats-Unis. C'est également le groupe chinois qui équipera les futures navettes de toute la technologie autonome, soit la partie « software » du véhicule.
Objectif : réduire les coûts et augmenter la flexibilité
Le constructeur français se chargera quant à lui de la fabrication des navettes, qui seront une version modifiée du nouveau Renault master électrique. « La plupart des entreprises qui se sont lancées dans les transports autonomes ont disparu à cause du véhicule », a insisté Gilles Le Borgne. Le directeur technique a également souligné l'absence d'offres sur les segments que pourraient couvrir cette navette autonome, à savoir les lieux peu desservis pas les transports en commun en périphérie des villes.
« Aujourd'hui, un tramway coûte 20 millions à 70 millions par kilomètre, c'est 500 millions pour un métro et 600.000 à 700.000 euros pour des bus. Une navette autonome coûterait 300.000 euros sans compter les gains de service avec l'absence de chauffeur », a précisé Jean-François Salessy, vice-président du service des technologies avancées chez Renault.
Seule une couverture 5G est requise pour l'utilisation de ces véhicules ainsi qu'un opérateur pour 10 à 15 navettes, afin de gérer des situations complexes où la navette se retrouverait bloquée dans le trafic. Le constructeur français assure que ces nouveaux véhicules apporteront de la flexibilité aux usagers ainsi qu'un coût plus faible que les transports publics existants.
Des questions qui demeurent
Pour s'assurer de la mise en circulation de ces véhicules, Renault a travaillé en coordination avec les administrations ou encore Anne-Marie Idrac, l'ex-secrétaire d'Etat aux Transports. « La France et l'Allemagne ont validé la législation pour la circulation des navettes autonomes », s'est réjouit Jean-François Salessy.
Malgré le potentiel vanté par Renault, de nombreuses questions demeurent concernant le véhicule autonome en particulier autour du partage de la responsabilité en cas d'accidents et sur les cyberattaques. Et il n'est pas encore dit que les villes soient prêtes à prendre le risque. L'année dernière, l'entreprise lyonnaise Navya a été placée en redressement judiciaire, avant d'être reprise par les groupes Gaussin, spécialisé dans le matériel de levage, et Macnica, déjà distributeur des navettes en Asie.
« Navya était plutôt concentrée sur les passagers. Un énorme effort avait d'ailleurs été fait sur la conduite autonome sans chauffeur, avec une vision pour l'implémenter sur la route. Il y a des réglementations et une homologation routière beaucoup plus complexes que dans des sites fermés. C'est d'ailleurs, un peu, ce qui avait amené Navya dans une impasse. Elle investissait énormément dans le développement vers un débouché plus « long-termiste qu'il fallait pouvoir supporter », avait confié Jean-Claude Bailly, jusqu'alors vice-président exécutif de Gaussin, à La Tribune en octobre dernier. Le fabricant a décidé de se réorienter vers des sites fermés comme les plateformes logistiques, les ports ou encore les aéroports, moins coûteux en développement.
Renault a bien précisé qu'il n'irait toutefois pas sur les voitures aux particuliers autonomes, considérant qu'il s'agit d'un coût trop important pour un objet qui reste immobile 95% du temps. D'autres constructeurs ont quant à eux fait le pari de la voiture particulière autonome, mais pour les taxis, vantant là aussi la rentabilité, par l'absence de chauffeur et l'utilisation de ces véhicules 24h/24h. C'est le cas de Tesla, qui annoncera ses robots-taxis le 8 août prochain, a annoncé son dirigeant Elon Musk sur le réseau social X le mois dernier.
Marie Nidiau / latribune.fr