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« Industrie verte » : Bruno Le Maire prépare un plan de riposte face au protectionnisme américain

11/01/2023

« Industrie verte » : Bruno Le Maire prépare un plan de riposte face au protectionnisme américain

Bruno Le Maire veut faciliter financièrement l’essor des « industries vertes » en France. Ici les nacelles du parc éolien en mer de Saint-Nazaire, avant leur pose. | OUEST-FRANCE / FRANCK DUBRAY

Face aux subventions massives de Joe Biden à l’économie américaine, Bruno Le Maire prépare un plan de soutien à « l’industrie verte », en France et auprès de Bruxelles.

Le ministre de l’Économie Bruno Le Maire a annoncé sur France Inter, mercredi 4 janvier, puis lors de ses vœux, le 5 janvier, qu’il prépare un projet de loi pour soutenir l’industrie verte », dont il fait une priorité absolue pour 2023 ».

Le texte comprendra des dispositions fiscales, réglementaires, législatives pour accélérer la réalisation en quelques mois, de sites industriels en Franceafin d’en faire la première nation de l’industrie verte en Europe », promet-il.

Ambitieux, car en 2020, la France a été le seul membre de l’Union européenne à être en retard sur la part des énergies renouvelables dans son mix énergétique (19,6 % au lieu de 20 %).

Le nucléaire compris

Dans cette « industrie verte », Bruno Le Maire englobe l’hydrogène, les batteries électriques, les énergies renouvelables ainsi que l’électricité nucléaire ». ​Pas anodin, car EDF, dont les pertes et l’endettement s’aggravent dangereusement, pourrait être confronté à au moins 55 milliards d’euros d’investissements pour les six réacteurs souhaités par Emmanuel Macron et qui ne rapporteront pas un centime durant au moins dix ans.

Le projet de loi doit être coordonné par le président (Renaissance) de la commission des Affaires économiques à l’Assemblée, Guillaume Kasbarian, et bouclé avant l’été. Il comprendrait cinq volets : la fiscalité, le « made in France », la réutilisation des friches industrielles, la mobilisation de l’épargne des Français dans un « Livret industrie verte », la formation de la main-d’œuvre nécessaire.

Une riposte à l’IRA américain

Afin que ces industries puissent bénéficier d’aides d’État plus importantes, plus rapides, plus simplifiées », ​Bruno Le Maire va également lancer, avec son homologue allemand Robert Habeck, une initiative pour que l’Europe se dote de l’équivalent de l’Inflation Reduction Act américain (IRA).

Arraché au Congrès américain en août 2022, l’IRA est le principal plan économique et social de Joe Biden, avec la bagatelle de 369 milliards de dollars d’aides à la transition énergétique, sous réserve que les équipements (voitures, batteries, etc.) soient produits en Amérique du Nord. Ce qui a provoqué la colère des Européens, dont Emmanuel Macron, qui l’a fait savoir lors de sa récente visite à Washington.

La France aura-t-elle les moyens de suivre les enchères américaines ? Peu probable. Bercy a déjà fait savoir qu’il ne s’agit pas d’alourdir davantage la dette française. Mais de favoriser le « made in France » dans les appels d’offres, de créer des niches fiscales « vertes », de piocher dans le plan France 2030 ou de réorienter un peu des 5 700 milliards de placements financiers des Français.

Du côté de l’industrie, Jules Nyssen, nouveau président du Syndicat des énergies renouvelables (SESR), estime que les annonces de Bruno Le Maire vont dans le bon sens et complètent  la loi d’accélération des énergies renouvelables, qui porte surtout sur un déverrouillage technique des projets ». Il juge encourageant que la transition énergétique soit aussi perçue comme utile à l’industrie des territoireset que face aux mesures américaines on sache adopter une stratégie industrielle agressive ».

La filière hydrogène s’impatiente

L’impact de la future loi «industrie verte» pourrait être fort pour une filière française de l’hydrogène qui se sent bridée dans son élan.

France Hydrogène, l’association qui réunit les 460 acteurs du secteur, vient en effet de recenser 250 projets dans toute la France, totalisant une capacité annuelle de production d’hydrogène d’un million de tonnes d’ici à 2030.

Assez pour respecter les impératifs que l’Union européenne a adoptés dans son paquet « Fit for 55 » en juin, qui vise à réduire les émissions de CO2 de 55 % en 2030. Car ce gaz, qu’on produit notamment par électrolyse de l’eau, est précieux pour décarboner l’industrie et les transports.

Le problème est que la plupart de ces projets ne sont pas réellement engagés,alerte Philippe Boucly, président de France Hydrogène, l’organisation qui fédère ses 460 acteurs. D’une part, « les investisseurs ne voient pas clair dans le cadre réglementaire, qui est encore trop lourd ». D’autre part, « il n’existe toujours pas de mécanisme pour compenser le surcoût de production de l’hydrogène vert ». Enfin, « une incertitude apparaît sur le volume d’électricité, d’origine renouvelable ou nucléaire, car il faut les deux, qui sera disponible pour produire cet hydrogène ».

L’attente d’un mécanisme de soutien

L’hydrogène semble pourtant bien traité par le gouvernement, avec son plan à 9 milliards annoncé en 2020. Le 28 septembre, lors d’un déplacement dans une usine de Plastic Omnium qui fabrique des réservoirs d’hydrogènes, la Première ministre Élisabeth Borne a annoncé 2,1 milliards d’euros de subventions à dix projets d’usines.

Cela concerne des fabricants d’équipements, tels que les électrolyseurs, les réservoirs, les piles à combustible, etc. C’est une bonne chose mais ce n’est pas suffisant, estime Philippe Boucly. Il faut aussi stimuler la production d’hydrogène. Donc alléger les contraintes réglementaires et mettre en place un mécanisme de soutien au prix de l’hydrogène vert. Faute de quoi il n’y aura pas de clients pour l’acheter ».

Un tel soutien estindispensable, par exemple, pour que les constructeurs français d’utilitaires à hydrogène, puisque la France a la chance d’en compter deux, puissent rapidement en abaisser les coûts en augmentant les volumes de production ».Il qualifie donc de positif le projet de loi annoncé par Bruno Le Maire mais attend que l’État passe du discours aux actes ».

www.ouest-france.fr

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