Laurent Lascols et Corentin de Montmarin
Laissons derrière nous les hésitations de l’UE, il est grand temps pour les entreprises de faire leur choix en matière de communication extra financière.
En février dernier, la Commission Européenne annonçait son intention de réduire les formalités administratives et de simplifier l’environnement normatif des entreprises. Le premier chapitre de cette simplification a concerné, à travers le projet Omnibus, le reporting de durabilité.
A l’issue d’un cheminement législatif complexe au niveau européen, nous affirmons qu’il ne faut pas attendre un instant de plus pour agir en matière de reporting RSE.
Ce qu’on appelle plus généralement le reporting extra-financier est une grande valise où se sont succédé différents dispositifs ayant pour but d’inciter, voire de contraindre les entreprises à divulguer un certain nombre d’informations essentielles à la prise de décision de leurs parties prenantes. Une vision étriquée n’y inclut que les actionnaires et les investisseurs, une vision élargie y intègre les clients, les prestataires, les donneurs d’ordres, les territoires et toutes les organisations qui contribuent à ce que l’entreprise soit unique, se développe et existe. Communiquer avec ses parties prenantes sur les enjeux qui sortent du périmètre financier, ce n’est pas simplement une obligation réglementaire, c’est un principe de bonne santé pour les entreprises.
Le débat européen sur les seuils de la CSRD et de la CSDDD ou le nombre de points de données ESRS n’a rien apporté sur cette question. Il est urgent de le mettre derrière nous.
45000 entreprises sortent du champ de l’obligation européenne de reporting prévu par la CSRD.
Est-ce une chance pour elles ?
Sous l’apparence d’une libération de contraintes administratives, s’ouvre en réalité un singulier flou juridique et la nécessité pour chacune de se faire sa propre idée sur le modèle de reporting à retenir. Ceci d’autant plus que les institutions européennes ne s’interdisent pas d’élargir à nouveau le scope de la CSRD.
Les obligations en matière de reporting extra-financier sont toujours importantes et elles continuent de se développer dans le monde. Le recul européen ne doit pas être confondu avec un relâchement généralisé, c’est essentiellement une perte de souveraineté sur l’origine de la norme.
Ces obligations internationales ou locales continuent de se développer car le réel n’a pas attendu la fin des atermoiements européens ou l’issue malheureuse de la COP 30. Partout dans le monde les effets du changement climatique se font ressentir, et nous ne sommes qu’en 2025. Partout dans le monde les consommateurs s’inquiètent de voir fondre leur pouvoir d’achat. Partout dans le monde, les entreprises doivent produire plus avec des ressources qui courent à l’épuisement.
Il est temps de construire des modèles de développement qui soient durables.
Nous vivons dans un monde où les entreprises sont très largement interdépendantes, la mise en œuvre des standards de communication extra financière va conduire toute la chaîne de valeur des entreprises concernées à se mettre en mouvement. Mais encore faut-il y voir clair.
Parmi les possibilités qui s’offrent à vous, les entreprises, existent le GRI, l’ISSB, la nouvelle norme ISO 53001 et, encore et toujours, la CSRD et sa petite sœur la VSME. L’important est de comprendre que le choix est désormais entre vos mains.
Déciderez-vous de prendre la côte la plus raide mais la plus souveraine en vous alignant sur les ESRS redéfinis de la CSRD ? Prendrez-vous le standard le plus international, le GRI, apprécié des ONG et des institutionnels ? Adopterez-vous le standard de l’ISSB pour la matérialité financière ? Opterez-vous pour la VSME, standard des PME européennes ?
Celles et ceux qui s’engageront sur le chemin de la communication extra financière dès à présent en seront récompensés. Ce reporting est un outil de gestion des risques et des opportunités, un outil de clarification de la gouvernance. C’est un outil de pilotage efficient, pas une vaine contrainte. Les critères ESG sont un véritable levier d’accès à l’investissement dans un monde où les conditions physiques d’existence des entreprises peuvent changer radicalement en 10 ans. Les entreprises qui auront perçu cet enjeux les premières l’imposeront à l’ensemble de leur chaîne de valeur car il n’y a pas plus grande force entrepreneuriale que le pragmatisme.
Le choix est là, peu importe que le législateur européen ne vous ait pas rendu la tâche aisée. Le retournement politique européen ne doit pas cacher que la tendance est claire : la transparence ESG est un mouvement mondial irréversible, qu’elle s’habille en RSE, en transition écologique ou encore en CSRD. Ceux qui travaillent la question de la durabilité depuis plus de 30 ans savent que sa croissance est inéluctable.
Quel standard exprime le mieux votre maturité, votre expertise, vos ambitions ? Il est grand temps de laisser derrière nous les hésitations de l’année 2025 pour donner à votre entreprise les moyens d’affronter les enjeux de l’avenir.